Facilitation graphique : comment fixer ses tarifs quand on débute ?

Quel tarif proposer lorsqu’on débute en tant qu’indépendant dans le domaine de la pensée visuelle ? Comment fixer ses prix que ce soit pour une prestation d’illustration ou pour une captation visuelle (scribing) ? Depuis quelques temps, je reçois régulièrement cette question alors voici quelques éléments pour vous aider à établir votre premier devis au “juste prix“.

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Un temps que les moins de 30 ans ne peuvent pas connaître ©TF1

Voici comment je résumerais les étapes à suivre :

  1. J’étudie les prix du marché
  2. Je positionne mon prix entre le prix le plus haut et le plus bas du marché. Pas simple, on va le voir, étant donné le marché de la facilitation graphique aujourd’hui
  3. Je recueille finement les besoins du client et reformule les objectifs
  4. Je fais abstraction du syndrome de l’imposteur pour proposer le “juste prix”
  5. Je réévalue le périmètre de ma mission si le client me demande de baisser mon prix

1. J'étudie les prix du marché

Commencez par regarder ce qui se pratique ailleurs, sur les sites des consœurs et confrères, c’est un bon début. Par exemple, sur supertilt.fr, vous trouverez les tarifs de bon nombre de prestations. Vous pouvez aussi contacter directement les professionnels pour expliquer que vous vous lancez et que vous avez besoin de conseils. Faites un tour du côté des sites de mise en relation avec des freelances comme Malt. Même si ce genre de plateformes n’est pas forcément un bon indicateur puisqu’elles “cassent” les prix. Cela aura au moins le mérite de :

  1. vous permettre de vous situer en déterminant une fourchette de prix
  2. vous donner une idée de prix par jour ce qui est plus simple au démarrage. Il est plus facile de réaliser un chiffrage forfaitaire d’une mission quand on a de l’expérience et davantage de points de comparaison.
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Exemple de tarifs pour des prestations de facilitation graphique malt.fr

2. Déterminer son prix parmi une offre pléthorique

Résultat du benchmark : des tarifs allant de 400€ jour en passant par 1500€, et pouvant aller à ma connaissance jusqu’à 4000€ pour les intervenants les plus reconnus. Nous voilà bien avancé, avec une fourchette si large, pour a priori la même prestation, comment s’y retrouver ? C’est la réalité du marché aujourd’hui. En quelques années, nous avons vu émerger un nombre impressionnant de praticiens venant d’horizon variés et avec des gamme de tarifs très divers. Si nous n’arrivons pas à nous y retrouver, imaginez les clients 🙂

Si vous débutez, n’oubliez pas un point : on ne vend pas uniquement la prestation du jour J ou le livrable. Il faut aussi prendre en compte la préparation, les échanges, le temps de gestion de l’ordre de quelques minutes “par-ci par-là”, la post-production dans le cas de nettoyage de fresque etc. Tout ceci est à intégrer au devis pour avoir un prix journalier correct.

3. Prendre le temps de recueillir les besoins

Évaluer le temps de réalisation d’une mission implique avant tout un recueil des besoins précis auprès du client. Il vaut mieux avoir en tête qu’il ne sait parfois pas lui-même ce qu’il veut exactement et que notre rôle est de l’aider à clarifier sa demande. Prendre le temps à cette étape est donc primordial pour éviter tout malentendu et limiter les allers-retours.

4. Faire abstraction du syndrome de l'imposteur

Bien souvent quand on reçoit une première demande, on ne sait pas donner un chiffre et on éprouve le syndrome de l’imposteur. Il nous amène à dévaloriser nos capacités par rapport à la demande. On ne veut pas demander des tarifs trop élevés par peur de perdre des clients potentiels, c’est tout à fait légitime. Si on voit le tarif d’un confrère, il y a de fortes chances qu’on se positionne en dessous puisqu’on estime avoir moins d’expérience, ce qui est logique mais il faut rester dans une juste mesure. Notons que ce fichu syndrome de l’imposteur arrive aussi quand on a de l’expérience alors qu’il n’y a aucun élément tangible qui permettent de dévaloriser la prestation !

Je recommande de commencer par estimer son tarif par rapport aux prix moyen du marché, en faisant le plus possible abstraction du syndrome de l’imposteur. Plus facile à dire qu’à faire bien sûr mais cela évitera de dévaloriser le marché. Et d’un point de vue commercial, il est toujours plus difficile d’augmenter ses tarifs par la suite, surtout si on est amené à travailler avec le même client. L’enjeu est d’arriver à déterminer un juste prix, un compromis entre le tarif jour le plus bas et le plus élevé du marché.

Il est important de ne pas dévaluer son tarif au lancement pour une autre raison : il y a de fortes chances que votre premier devis soit sous dimensionné par rapport à la charge de travail réelle. Si on rentre dans la logique d’essai et d’erreur, le premier devis est souvent réalisé “au pif”. C’est encore plus le cas sur ce type de prestations créatives. Il faut certainement provisionner une marge de 10 % au moins au début. Petit aparté : personnellement je ne vends pas à mes clients la courbe d’apprentissage, c’est à dire le fait que j’apprenne et acquière une compétence au moment de la mission. Dans ce cas, la mission peut être plus longue mais pas plus chère.

Autre élément important : réaliser le chiffrage indépendamment de la capacité financière du client dans un premier temps. Si votre prix lui semble trop important, les négociations se feront dans un 2ème temps. En lui demandant de combien il dispose, vous pourrez peut-être vous aligner sur son budget. En revanche, si son budget est largement inférieur il faut certainement lui proposer de renégocier la prestation et le périmètre de la mission. Ne rentrez surtout pas dans la logique de vendre le beurre et l’argent du beurre.

5. Vendre un prix ou vendre de la valeur

C’est très important de connaître le coût d’un produit ou d’un service, mais c’est encore plus important de savoir quelle valeur cette prestation génère. En discutant avec le client on se rend compte de la valeur induite par notre prestation et quels bénéfices il va en tirer. Il vaut mieux réfléchir à la manière dont on apporte de la valeur aux problématiques du client via notre prestation que de se focaliser sur le prix. Il faut savoir comment se positionner par rapport à la concurrence, connaître ainsi la valeur de son expertise et sa différenciation par rapport aux autres.

Est ce que votre client achète un “petit dessin” ou achète-t-il un petit dessin qui donne à voir la complexité, favorise un apprentissage, aura de l’impact pour sa stratégie, sa visibilité, sa cohésion d’équipe ? Il est possible que vous passiez peu de temps pour réaliser une prestation mais que celle-ci soit d’une grande valeur ajoutée pour votre client. Cette question de la valeur est pour moi l’élément fondamental à prendre en compte.

La question du statut

Parenthèse qui a son importance, si vous êtes auto-entrepreneur, il vous faudra ajouter environ 30 % à votre salaire net idéal pour couvrir vos charges sociales et fiscales à moins que vous ne bénéficiez d’exonérations grâces à des aides financières comme l’ACCRE. Veillez aussi à intégrer la CET (Contribution Économique Territoriale) et l’impôt sur le revenu.

Si vous avez un autre statut (entreprise individuelle, etc.), n’hésitez pas à doubler la rémunération souhaitée, les charges diverses représentant environ 50% du bénéfice.

La protection de ses oeuvres et le droit d'auteur

Dans notre cas, il faudra intégrer un volet “cession de droits d’auteur”. Une personne créant une œuvre originale en est l’auteur. À ce titre, vous êtes et vous serez toujours l’auteur de l’œuvre créée, même si le client vous achète la prestation.

Il y a 2 types de droits sur une œuvre :

  • Le droit moral qui associe un auteur à son œuvre et celui-ci on ne le cède pas, même si on peut vous demander d’effacer votre nom (vente en marque blanche). C’est important que le client le comprenne, beaucoup ne sont pas au courant.
  • Le droit patrimonial : c’est celui que l’on va céder. Cela inclut le droit d’utilisation, le droit de modification, de reproduction…

Veillez à prévoir un forfait de 10% du montant total concernant la cession des droits intellectuels.

Vous pouvez vous pencher sur le droit patrimonial pour approfondir la question des droits d’auteur ou bien utiliser l’une des licences creatives common pour une gestion simplifiée.

 

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