Que faire quand le déroulé de ton atelier devient obsolète 30 minutes après le démarrage ?
C’est exactement ce qui m’est arrivé lors d’une journée de facilitation. Tout partait pourtant bien : un bon cadrage avec le client, une prise de brief claire et anticipée, un client mobilisé… Bref, toutes les planètes semblaient alignées.

La préparation : quand tout est (presque) parfait
La veille, je peaufine mon filage pour proposer la meilleure expérience possible aux participant(e)s. Le jour J, j’arrive une heure en avance. Je prends le temps de préparer la salle, d’organiser les îlots pour que la circulation soit fluide, et de m’imprégner des lieux.
Les participant.es arrivent : l’ambiance est courtoise, polie, calme (trop calme ?).
Le commanditaire fait son introduction. Pas de réaction particulière, ni verbale, ni non verbale. C’est vraiment trop calme à mon goût. Je prends la main et lance la phase d’inclusion avec entrain. Après tout, c’est vendredi, autant terminer la semaine en beauté !
L’alerte rouge : une tension palpable
La dizaine de personnes est censée bien se connaître. De mon côté, c’est la première fois que je les vois. Je commence donc par l’icebreaker “constellation”, avec des questions simples. Très vite, un schéma se dessine : la tension est à son comble chez à peu près tout le monde.
Lorsque je réalise que l’atmosphère est lourde, je prends deux minutes pour expliquer aux participant.es que les conditions ne sont pas réunies pour la journée prévue (travailler sur l’amélioration du fonctionnement collectif). Ils ne semblent pas surpris.
Je leur explique qu’il n’est pas question d’infliger une telle journée à qui que ce soit et que mon rôle est de garantir la sécurité émotionnelle de chacun(e).
Improviser et changer de cap sans paniquer
Je propose alors un vote anonyme pour mesurer leur niveau d’engagement pour les heures à venir. Une fois les votes récoltés, je pousse un soupir de soulagement (dans ma tête) et décide d’adapter le déroulé de la journée.
Plutôt que de forcer l’agenda initial, je modifie les timings et introduis des exercices pour permettre au groupe de “crever les abcès“. J’utilise donc un format “bocal à poissons”, qui invite à exprimer ouvertement les tensions et les non-dits.
Après cette phase émotionnelle difficile mais nécessaire, les conditions étaient enfin réunies pour engager des réflexions collectives et constructives.
Une journée qui finit (bien) mieux qu’elle n’avait commencé
À la fin de la journée, tout le monde – sans exception – a témoigné que la phase du matin, bien qu’intense, était indispensable. Beaucoup ont été surpris de ce qui avait émergé du collectif. Ce qui était loin d’être gagné, rétrospectivement.
Et si c’était à refaire ?
Est-ce que j’aurais pu éviter cette situation ? Sans doute… Mais comment ? Honnêtement, je n’en ai aucune idée. Nous étions dans les non-dits.
Ce dont je suis fier, c’est d’avoir gardé mon cadre et mon calme. Pendant quelques minutes, je me suis senti comme un pilote d’avion en plein crash. Mais j’ai réussi à redresser la barre, sans paniquer et sans que les “passagers” ne soient traumatisés.
Je rencontre ce type de situation environ une fois par an, et je me sens de plus en plus à l’aise avec l’idée d’interrompre un atelier plutôt que de m’acharner à suivre un agenda inadapté. Ce qui compte vraiment, c’est que les conditions émotionnelles soient réunies pour permettre à l’intelligence collective de fonctionner.
Ce que je retiens de cette expérience
1️⃣ Savoir suspendre, même si c’est inconfortable.
2️⃣ Garder son cadre et son calme, même quand tout semble partir en vrille.
3️⃣ Ne pas forcer un agenda si les conditions ne sont pas réunies.
Et vous ?
Et vous, ça vous est déjà arrivé d’abandonner votre plan A pour partir sur un plan B (ou même C) ? Partagez vos expériences, je serais curieux de savoir comment vous gérez ces moments où tout dérape… mais où on finit par retomber sur ses pieds.