Vous entendez parler d’IA partout mais vous ne savez pas encore par où commencer, ni comment décider si votre organisation doit s’y engager maintenant, plus tard… ou pas du tout ? Cet article propose un cadre simple et concret : 8 questions pour mener ses réflexions et prendre des décisions. Une ressource pensée pour les dirigeant·es, responsables innovation, équipes métiers ou RH qui veulent avancer sans se précipiter.
Le 10 octobre 2025, j’ai eu le plaisir de faciliter un atelier lors de la journée Resil IT, organisée par Digital League à la Métropole de Lyon. Une journée entière consacrée à une question que beaucoup d’entreprises se posent aujourd’hui : comment concilier numérique, responsabilité et résilience dans un contexte de polycrises et de transitions retardées.
Notre groupe de travail était composé de Naomi Roth, Emmanuel Nurit, Claire Verdier, Katia Rebowska, Stéphane Labartino, Sami Torres et Rémy Dujardin, que je remercie chaleureusement pour la richesse des échanges et des regards croisés.
Nous nous sommes penchés sur un sujet à la fois passionnant et complexe : la juste place de l’intelligence artificielle dans les organisations. Avec une ligne directrice en tête : aider les PME et ETI à questionner la pertinence, l’impact et la responsabilité de leurs projets IA, sans céder au réflexe “on devrait y aller parce que tout le monde y va”.
Nous avons structuré la réflexion autour de 8 questions clés, conçues comme une grille de lecture à revisiter à chaque étape d’un projet.
L’ensemble des travaux de la journée – sur les 5 thématiques Resil IT – feront par ailleurs l’objet d’un livre blanc, mis à disposition par Digital League.
- Pour rester informé·e de sa parution, vous pouvez suivre leur actualité.
Pour commencer...
Avant même d’aborder les usages possibles, une première question a servi de point d’entrée au groupe :
- Avez-vous un sentiment d’urgence à passer à l’IA ?
- Si oui, qu’est-ce qui nourrit ce sentiment ?
Cette question permet de distinguer un besoin réel d’une pression ressentie : compétition perçue, discours médiatiques, injonctions internes, peur d’être en retard, etc. Elle sert à poser le cadre avant toute décision.
Les 8 questions à se poser avant de se lancer
1. Qu'est-ce que je cherche vraiment à résoudre... ?
“… et quelle valeur cela apporte-t-il ?”
Il s’agit d’abord de clarifier le besoin, les publics concernés et la valeur attendue avant d’évaluer la solution.
- Quel besoin et quels publics cibles souhaitez-vous adresser ?
- Quelle est la problématique métier que vous souhaitez confier à l’IA ?
- Quelles valeurs ajoutées (qualitative et quantitative) projetez-vous avec l’IA ?
- Quelle valeur ajoutée identifiez-vous à utiliser l’IA et à ne pas utiliser l’IA ?
2. Ai-je vraiment besoin de l'IA pour adresser ce besoin ?
Avant d’envisager un outil d’IA, il est utile de réfléchir aux solutions non-IA qui peuvent déjà répondre au besoin.
- Quelle pourrait être l’alternative à l’utilisation de l’IA pour votre projet ?
- Le besoin existait-il avant la proposition de résolution par l’IA ?
- L’usage attendu est-il pour remplacer un processus fonctionnel ou pour résoudre des dysfonctionnements ?
3. Le jeu en vaut-il la chandelle ?
L’IA peut créer de la valeur, mais elle engage aussi des coûts, des risques et des renoncements. La question est celle du rapport bénéfice / engagement.
- Quels critères allez-vous adopter pour décider de la mise en place ?
- Que risquez-vous de perdre avec l’utilisation de cette technologie ?
- Quels sont les coûts financiers, humains, organisationnels, réputationnels ?
4. Quel niveau de dépendance suis-je prêt à accepter ?
Chaque solution d’IA implique un degré de dépendance technique, juridique ou stratégique : à un fournisseur, à une plateforme, à une infrastructure ou à des données.
- Avez-vous des contraintes de souveraineté des données ?
- La solution envisagée est-elle souveraine ?
- À quel point serez-vous dépendant de cette solution et de ce fournisseur ?
5. Votre organisation est-elle prête à adopter l'IA ?
Mettre en place l’IA n’est pas seulement un projet technique : c’est une transformation organisationnelle, culturelle et humaine.
- Où en est votre organisation en termes de connaissance, compétence et adoption ?
- Connaissez-vous le cycle de vie d’une IA ?
- Quelle est la maturité de vos équipes ?
- Comment allez-vous les accompagner ?
- Quel est l’usage actuel de l’IA dans vos processus ?
- Êtes-vous à jour sur les réglementations en vigueur (RGPD, AI Act, DSA, DMA) ?
6. Comment garder la maîtrise et le contrôle de cette technologie ?
Une IA ne s’utilise pas en “pilotage automatique”. Elle nécessite une gouvernance, du suivi et une supervision humaine explicite.
- Quels garde-fous avez-vous mis pour garantir un usage raisonné de l’IA ?
- Qu’êtes-vous prêts à déléguer à l’IA ?
- Quelle est votre maîtrise des données, des résultats ? Avez-vous un système en place garantissant la validation par l’humain des résultats ?
- Êtes-vous capable de mettre en place un système de suivi d’impact réel (positif ou négatif) ?
7. Quelles seront les conséquences en cascade de cette adoption ?
Au-delà du cas d’usage, chaque intégration d’IA a des effets sur les métiers, la charge de travail, la coopération, la qualité ou la relation client.
- Si vous gagnez en productivité, allez-vous créer un goulet d’étranglement ?
- Comment allouer les ressources libérées par votre projet d’IA ?
8. Cette démarche est-elle alignée avec mes valeurs et ma stratégie ?
L’IA n’est pas qu’un outil de performance : c’est un choix de modèle, de gouvernance et de relation au travail.
- En quoi l’IA est-elle alignée/désalignée avec vos valeurs d’entreprise ?
- Abordez-vous ce projet en veillant à ce que l’humain reste au centre des décisions et des usages ?
Adopter l’IA n’est pas d’abord une question de technologie, mais une question de sens, de choix et de cohérence. Ces 8 questions n’ont pas pour but de freiner les projets, mais d’éviter qu’ils soient lancés trop vite (ou pour de mauvaises raisons).
Les organisations qui prennent le temps d’examiner pourquoi, comment et jusqu’où elles veulent intégrer l’IA ne perdent pas du temps. Elles sécurisent leurs décisions, renforcent leur gouvernance, et évitent de subir la transformation au lieu de la choisir.
La “juste place” de l’IA n’est pas la même pour tout le monde : elle dépend de la culture, des métiers, du niveau de maturité et du sens qu’on veut donner à son usage. Ce qui compte, c’est de rester en mesure d’expliquer ses choix, de les ajuster et d’en assumer les effets collectivement.
Et si on en discutait ?
Vous voulez structurer votre démarche IA, mais vous ne savez pas par où commencer ?
Nous vous aidons à passer de l’idée au cadrage stratégique : cadrage d’usage, gouvernance, feuille de route, acculturation.