Scrum Master, quelle posture tenir en rétrospective ?

Vous êtes Scrum Master et vous préparez la prochaine rétrospective à venir. Si en plus de ce rôle, vous avez des tâches à faire sur l’itération, vous allez occuper la position la plus inconfortable : gérer le cadre des échanges tout en voulant participer. Dans cet article, je vous partage quelques conseils pour maîtriser ce jeu d’équilibriste. 

Clarifiez votre position

En tant que Scrum Master, c’est certainement vous qui aurez à ouvrir la rétrospective, c’est-à-dire à poser le cadre de ce qui va suivre. 

Parmi les éléments à préciser, je vous invite à partager avec le reste du groupe la position que vous souhaitez avoir. Souhaitez-vous uniquement être dans la gestion des échanges et de la rétrospective ou souhaitez-vous aussi donner votre avis pendant les échanges ou les 2 ? 

Tenir la première position est “assez simple”, votre rôle est clair, centré sur l’animation, l’observation du respect des règles du cadre de la rétrospective, le temps, la distribution de la parole. Vous avez en quelques sortes une seule mission : vous assurer que la rétrospective soit efficace, quelle que soit la nature des échanges. 

Tenir la 2e position est également assez facile. Vous souhaitez être au même niveau que les autres. Vous vous souciez de votre écoute et de vos opinions, vous interviendrez au même titre que chaque participant. Mais dans ce cas, qui gère le cadre de la rétrospective ?!?! 😉

Tenir les 2 positions en même temps est sans doute le plus difficile. Il y a un grand risque de conflit d’intérêts. En effet, vous gérez le fond et la forme. Le pire qui pourrait arriver serait par exemple que vous exprimiez votre opinion et comme vous gérez les échanges, vous décidez de ce qui est juste ou pas. Vous voyez la difficulté de la position à tenir ?

Demandez à clarifier

Ce qui peut sembler évident pour les uns ne le sera pas forcément pour les autres. Lorsqu’un argument ou une idée sont exprimés, n’hésitez pas à poser des questions de clarification, à inviter la personne qui s’exprime à préciser ce qui pourrait être flou. Le meilleur exemple est d’être attentif à l’usage du “on” qui pourra donc se traduire par la question : “Qui est ‘on’ dans ta phrase ?”

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Parler en son nom

Je vous conseille de poser cette règle au démarrage de chaque rétrospective. Parler en son nom c’est inviter chaque personne présente à s’exprimer avec “Je”. Une différence de formulation de phrase qui fait toute la différence. Derrière l’emploi du “Je” nous recherchons à exprimer nos propres ressentis, à rester responsables de nos opinions et à limiter notre jugement sur les autres. C’est aussi indirectement une invitation à clarifier sa pensée et à ne pas penser à la place des autres (présents ou absents). Chacun.e reste ainsi libre de ses idées et légitime d’exprimer ses propres ressentis.

Bien qu’il soit “facile” de (faire) poser des règles au début de la rétrospective, le plus exigeant pour vous Scrum Master sera de faire respecter cette rigueur conversationnelle. Dès qu’une personne ne parle plus en son nom, n’hésitez pas à l’inviter à reformuler sa phrase “en utilisant je”. Si elle n’y arrive pas, le reste de l’équipe peut l’y aider.

Parler en son nom veut dire parler : 

  • Des faits que j’ai observés
  • Des ressentis que je vis
  • Des besoins que j’ai 
  • Des demandes que je veux formuler aux autres
Vous pourrez regarder plus en détails tout ce qui relève de la Communication Non Violente, c’est une belle source d’inspirations. 

Gardez une continuité

Quelles sont les actions décidées lors de la dernière rétrospective ? Cette question posée au démarrage amènera souvent un silence par les équipes qui se soucient peu ou mal du suivi de leurs actions de rétrospective.

Pour que cet exercice d’équipe reste un moment utile et attendu par tous, restez prudent et évitez l’effet “One Shot”. C’est-à-dire une séance de rétrospective qui pourra être intense, voire fructueuse, mais qui sera oubliée dès que l’équipe repartira sur ses autres activités d’itération. En tant que Scrum Master, vous avez la responsabilité de ce suivi, et je vous invite à chercher comment responsabiliser un maximum de membres de l’équipe au suivi de ses actions de rétrospective. 

Mais ne soyez pas dogmatique. Certaines situations d’équipe ou certains évènements font qu’une rétrospective sur une itération donnée doit être centrée sur un sujet particulier. La continuité d’action avec la précédente rétrospective pourra être plus difficile à tenir. Faites en sorte que ce soit exceptionnel. 

Faites avancer l’équipe

Quoi de plus démotivant qu’une action ou une demande de l’équipe qui revient d’une rétrospective à l’autre ! 

Une rétrospective est conçue pour amener une action d’amélioration, pas un projet de révolution. Et c’est souvent dans cette 2e catégorie que tombent les décisions de beaucoup de rétrospectives. Résultat trop souvent constaté : votre équipe se demande à quoi sert une rétrospective et pourquoi il faudrait encore passer 2 h ou 3 h à rediscuter des mêmes sujets qui n’avancent pas. Effet démotivation garanti ! 

Si vous identifiez que la même action revient sur la table, c’est à vous Scrum Master de vous saisir de cette occasion et d’amener l’équipe à découper cette action en quelque chose de plus concret. Ça vous rappelle quelque chose ? Si vous ne savez pas de quoi je parle, demandez à votre Product Owner, c’est son quotidien de casser, découper, granulariser ses besoins 🙂

Équilibrez le positif et le négatif

Au-delà de l’attention permanente aux échanges, quelle sensation générale donne cette rétrospective ? Quelle est la tendance générale ? Plutôt Bisounours ou plutôt apocalyptique ? 

Cet exercice est bien délicat, je ne dis pas d’ailleurs que je fais bien à chaque rétrospective que j’anime, mais l’attention à la dynamique générale vous aidera à voir comment orienter son déroulé. 

Chercher l’équilibre est impossible. C’est juste un moyen de “nourrir” toutes les personnalités qui sont présentes. Certaines équipes ont des dynamiques particulièrement grincheuses et d’autres ne voient pas les problèmes. 

Assurez-vous dans vos rétrospectives que les membres voient le verre à moitié vide (en France, on y arrive facilement) ET à moitié plein.

Clôturez

Vous avez posé les règles au début de la rétrospective, pensez également à une étape de clôture. 

La version la plus simple est de proposer un résumé de ce qui s’est dit avec une synthèse des actions décidées. 

Vous pouvez enrichir cette clôture en demandant à tout le monde comment il a vécu cette rétrospective. Vous invitez les membres de l’équipe à prendre une position méta, à commencer à se reconnecter à ce qui va suivre (le week-end si vous êtes vendredi ou le lendemain). 

Attention : le plus grand risque en clôture est qu’elle se transforme en ouverture c’est-à-dire que les échanges repartent de plus belle ! Soyez ferme, mais courtois, une clôture est une clôture. Vous pouvez intervenir et rappeler que les sujets pouvaient être abordés pendant toute la rétrospective et que ce n’est plus l’heure de le faire. 

Chaque règle a ses exceptions. Certaines clôtures sont tellement intenses que vous pouvez demander à l’équipe si elle est d’accord pour étendre la rétrospective de 15, 30 ou 45 minutes. Au-delà, il faut sans doute reprogrammer un autre temps collectif. 

Trop de Post-it® tuent les Post-it® (et des arbres)

Même s’il existe quantité de modalités alternatives d’expression des idées, il faut bien avouer que demander à chacun(e) de les écrire sur des Post-it® est une pratique… pratique 😉 Pas besoin d’être formé (encore que… je vous expliquerai dans une vidéo comment bien décoller vos Post-it®), c’est une technique de brainstorming universelle et connue de tout le monde. 

On a du mal à se dire qu’inviter les personnes à exprimer leurs idées n’est pas toujours une bonne idée ! Imaginons : 

  • Vous êtes 10 personnes dans la pièce
  • Chacune d’elles exprime entre 5 et 10 idées en 5 minutes
  • Vous aurez entre 50 et 100 Post-It® ! 

Si en plus vous demandez à tout le monde de les lire, mauvaise tactique, c’est énorme à traiter ! Là, vous contrecarrerez mon affirmation en vous disant que pour réduire la complexité, vous allez faire des regroupements. Logique ! Oui et… ça vous ramène à votre dynamique d’équipe et sa capacité à converger (toutes y arrivent, mais pas avec la même efficacité et la même mobilisation générale). 

Vous ne traiterez plus des idées, vous traiterez des thèmes. Ce n’est pas la même chose ! D’un côté une idée est un reflet individuel, de l’autre un thème est un reflet collectif. Combien de thèmes ont absorbé les idées de chacun.e. Était-ce bien clair pour tout le monde que la rétrospective allait traiter de sujets collectifs plus qu’individuels ? 

Je chipote pourrez-vous penser… pas si sûr. Repensez à certaines rétrospectives et aux attitudes de certaines personnes qui ne semblaient pas concernées… N’attendaient-elles pas que vous parliez de leurs idées ? 🙂

Annoncez les règles du jeu

Une rétrospective (comme n’importe quel temps collectif) se déroule avec des règles collectives. Quelles sont celles que vous voulez proposer à l’équipe ? Voici quelques thèmes à poser en introduction : 

  • Durée
  • Déroulé
  • Règles conversationnelles
  • Les outils utilisés

Pensez aussi à vous assurer que tout le monde est d’accord avec ces règles. Si quelqu’un souhaite en ajouter, accueillez-les sauf si elles entrent en conflit. 

Distribuez la parole

Une rétrospective est un espace de parole, d’échanges et de partages. Encore faut-il avoir la place pour le faire. Si vous faites une rétrospective de 2h à 8 personnes, c’est 15 minutes de temps de parole par personne (au mieux !). Et encore, je n’ai enlevé ni les temps d’ouverture ni les temps de clôture, on serait dont plus près de 10 minutes par personne soit moins de 10% du temps ! Pas étonnant alors que certaines personnes s’expriment peu ou pas. 

Au premier dérapage de la pipelette de service (je sais de quoi je parle, je la suis parfois …), c’est du temps de parole en moins pour les autres. En tant que Scrum Master, vous devez apprendre à couper la parole ou du moins à interrompre une personne qui part trop loin. Facile à dire plus difficile à faire, surtout face à des personnalités fortes, imposantes ou aussi intéressantes 🙂

Je vous propose une technique simple : notez tous les prénoms sur une feuille et comptez le nombre de prises de parole. Vous verrez rapidement qui est absent du dialogue et quelle personne vous devez solliciter. 

Une autre stratégie que je vous invite à tester consiste à répartir l’équipe en sous-groupes, le temps de parole individuel est mécaniquement augmenté. 

Enrichir les conseils pour tenir sa posture en rétrospective

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