Les émotions, carburant (méconnu) du travail en équipe

Cela fait plusieurs années que nous intervenons en formation ou en accompagnement d’équipe. Nous voyons des personnes investies, pleines de ressources, mais souvent freinées par des tensions, une fatigue, ou un sentiment diffus de mal-être. Des signaux faibles, mais récurrents. Et surtout, une difficulté à mettre des mots sur ce qui est ressenti.

 

Ce n’est pas que les émotions n’existent pas en entreprise. D’ailleurs depuis une vingtaine d’années, grâce à des ouvrages comme L’intelligence émotionnelle de Daniel Goleman, les émotions trouvent progressivement leur place dans le monde du travail. C’est qu’elles sont rarement accueillies comme une donnée utile et seules les émotions dites “positives”, comme la joie ou l’enthousiasme, sont véritablement encouragées. Nous avons envie de proposer un regard ouvert, plus outillé aussi, pour que chacun.e puisse observer ce qui se passe pour lui ou elle au travail. D’où cet article et l’outil que nous partageons avec vous en fin de lecture !

1. Travailler, c’est ressentir (même sans le dire)

"Chacun sait ce qu'est une émotion, jusqu'à ce qu'on lui demande d'en donner une définition. À ce moment-là, il semble que plus personne ne sache."

Dans le monde professionnel, on valorise souvent la maîtrise, le rationnel, l’analyse. Pourtant, tout ce qui fait la vie d’une équipe est traversé  par des émotions : motivation, tensions, engagement, blocages, innovation… Elles influencent nos décisions, nos relations, notre manière d’être présent ou non. Les travaux du neuroscientifique Antonio Damasio sur le rôle des émotions dans la prise de décision ont révélé que, contrairement aux idées reçues, nous avons besoin de nos émotions pour faire des choix rationnels et efficaces.

 

Plusieurs décennies de recherche en psychologie du travail, prouvent aussi que les émotions ne sont pas des parasites de notre productivité, mais des composantes essentielles de notre intelligence professionnelle. Les travaux de Cary Cherniss démontrent que les organisations qui intègrent cette dimension émotionnelle voient leur performance collective s’améliorer significativement. Une étude de Gallup a révélé que les équipes qui intègrent le bien-être émotionnel dans leur fonctionnement voient leur productivité augmenter de près de 20%.

2. Une émotion n’est pas un problème à gérer

Une émotion, c’est un signal. Elle n’est ni bonne ni mauvaise. Elle dit quelque chose d’important sur ce qu’il se passe pour nous :

  • La colère signale qu’un besoin n’est pas respecté (clarté, justice, reconnaissance…)
  • La peur révèle une incertitude ou un besoin de sécurité
  • La tristesse pointe souvent une perte ou un décalage profond
  • La joie traduit un alignement avec ce qui compte vraiment

Ces émotions fondamentales (joie, colère, peur, tristesse…) sont universelles. Les recherches du Dr. Paul Ekman identifient comment ces expressions émotionnelles traversent toutes les cultures, et rappellent leur caractère fondamental dans nos interactions. La roue des émotions de Robert Plutchik est aussi un très bon outil qui cartographie la façon dont nos émotions primaires se combinent pour former des sentiments plus complexes.

Nommer une émotion, ce n’est pas être fragile. C’est être lucide.

3. Quand on ne les écoute pas...

Ne pas “accueillir” les émotions au travail, c’est laisser des équipes avancer avec des cailloux dans la chaussure.

Les non-dits s’accumulent, les tensions minent la coopération. Quand on les ignore, ces émotions finissent souvent par ressortir ailleurs : fatigue chronique, repli, silences, désengagement, conflits latents, voire burn-out.

 

Des études en neurosciences confirment que la régulation constante des émotions sans expression appropriée mobilise des ressources mentales importantes. Ce qui expliquerait en partie l’épuisement professionnel. Au-delà du climat social, le fait d’ignorer les émotions au travail affecte la performance individuelle et collective tout comme la santé mentale.

4. Et si on leur faisait une vraie place

Voici quelques façons simples d’intégrer les émotions dans la vie d’équipe, sans y passer des heures :

  • Intégrer un petit tour de météo émotionnelle en début de réunion (1 mot chacun.e)
  • Nommer une émotion quand elle influence votre posture ou votre ton
  • Introduire des rituels simples : “ce qui me pèse / ce qui me nourrit” (voir l’outil que nous proposons dans l’article sur le burn-out)
  • En tant que manager : accueillir sans corriger ou juger, parfois c’est déjà beaucoup

Ces pratiques contribuent à créer ce que les spécialistes appellent la “sécurité psychologique“, une condition dans laquelle les membres d’une équipe se sentent suffisamment en confiance pour prendre des risques, tels que donner des avis critiques ou poser des questions, sans crainte de représailles ou de jugement. Le risque serait de se limiter à la gestion des émotions positives, comme si la sécurité psychologique ne pouvait exister qu’en l’absence de toute forme de conflit ou de malaise. Bien au contraire, l’idée est de favoriser un environnement où toutes les émotions, positives ou négatives, peuvent être exprimées pour permettre à l’équipe de se réinventer et de s’adapter.

Un outil à tester : le journal des émotions au travail

Nous avons conçu un outil simple, duplicable dans Notion, qui permet d’observer ce que vous ressentez :

 

  1. Nommer l’émotion vécue et sa nuance
  2. Identifier le besoin associé
  3. Noter la réaction spontanée, puis celle que vous auriez préféré avoir
  4. Éventuellement, définir une action à poser

Notre démarche est avant tout pratique et accessible. Ce journal invite simplement à prendre un temps de recul sur ce qui se vit au travail, avec honnêteté et sans jugement. Il peut être utilisé individuellement à la fin d’une journée, en équipe dans un cadre sécurisé, ou lors d’un accompagnement professionnel.

 

Utilisé régulièrement, il a pour but de développer progressivement notre capacité à utiliser nos émotions comme des ressources plutôt que comme des obstacles.

Ressources utiles pour aller plus loin

Crédit : Aurélie Moris Photographe

Vous sentez que votre équipe s’épuise ?

Trop de sollicitations, plus assez de temps pour souffler, une charge mentale qui déborde… Et si on prenait un temps pour poser les choses et remettre du souffle dans l’organisation ?
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L'autrice

Emmanuelle Marceau
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