Manager à l’ère de l’IA : 5 questions à vous poser avant de transformer votre équipe

D’un côté, vous lisez partout que l’IA va révolutionner le travail. De l’autre, vous voyez vos collègues perdus entre ChatGPT, Copilot, et trois autres outils dont ils ne maîtrisent aucun. Entre les deux ? Vous. Le ou la manager, qui doit composer avec le narratif du moment qui pousse (en urgence) à prendre le virage et le doute de le prendre trop tôt. Voilà le paradoxe : tout le monde parle de l’IA, mais personne ne sait vraiment comment l’intégrer dans son équipe.

Alors avant de vous foncer tête baissée dans la transformation IA de votre équipe, prenez le temps de vous poser 5 questions essentielles. L’idée n’est pas de tout planifier (ce serait illusoire), mais d’avoir une idée de là où vous voulez aller, de ce que vous voulez préserver, et de ce que vous souhaitez réellement transformer.

Question 1 : Quelles sont les tâches sans valeur ajoutée de mon équipe ?

Imaginons une cheffe de projet qui passe du temps à rédiger des comptes-rendus de réunions de pilotage et autre réunions de travail. Elle déteste ça, personne ne les lit mais “il faut bien que quelqu’un le fasse”. Aujourd’hui, elle fournit les informations à des IA génératives (outil de transcription automatique). Résultat ? 15 minutes à relire et ajuster, au lieu de 2 heures à rédiger. Elle n’a pas été remplacée mais elle a dégagé du temps. Et avec ce temps retrouvé, elle peut  s’atteler à ce qu’elle fait de mieux : par exemple échanger avec les utilisateurs/clients, affiner le plan d’action, réfléchir à la stratégie.

Ce que vous pouvez faire cette semaine

Listez les tâches de votre équipe qui sont :

  • Répétitives (ex : mise en forme de documents, saisie de données)
  • Chronophages mais peu créatives (ex : rédaction de premiers jets, synthèses)
  • Mentalement épuisantes (ex : tri d’emails, recherche d’infos dispersées)

 Astuce : Faites cet exercice AVEC votre équipe, pas pour elle. C’est eux qui savent où ça coince vraiment.

Question 2 : Quelles compétences deviennent stratégiques avec l'IA ?

Ici, on touche un point sensible : si l’IA fait une (grande) partie de notre travail, quelle est notre valeur ? Chez SuperTilt on a fait un atelier en interne pour identifier les compétences qui prenaient de la valeur avec l’IA. Et devinez quoi ? Pas une seule compétence technique dans le top 3.

Les 3 compétences qui ressortent systématiquement :

  • L’esprit critique : savoir évaluer si ce que produit l’IA est pertinent, éthique, aligné avec vos valeurs
  • Penser la stratégie : poser les bonnes questions, imaginer des connexions entre les idées (l’IA ne sait pas être créative)
  • L’intelligence relationnelle : comprendre les non-dits, négocier, créer de la confiance (ce que l’IA ne fera jamais)

Autrement dit, plus l’IA gère le “quoi” et le “comment”, plus l’humain doit se concentrer sur le “pourquoi” et le “pour qui”.

Ce que vous pouvez faire cette semaine

Organisez une session de 30 minutes avec votre équipe autour de cette question : “Dans notre métier, qu’est-ce qu’on ne veut absolument pas déléguer à l’IA ?

Question 3 : Comment accompagner les résistances ?

Dans votre équipe, tout le monde n’est probablement pas enthousiaste à l’idée d’intégrer l’IA.  Il y a ceux qui ont peur d’être remplacés. Ceux qui trouvent ça “déshumanisant”. Ceux qui ne comprennent pas pourquoi on ajoute encore un outil à la pile déjà bien remplie. Toutes ces remarques sont légitimes. Le problème, ce n’est pas l’outil. C’est la méthode et le fait d’imposer l’IA sans répondre à des besoins.

Voici une proposition d’approche :

  • Partir de leurs douleurs, demandez “Qu’est-ce qui vous prend du temps ou de l’énergie ?” avant de proposer l’IA comme solution
  • Montrer avant d’imposer : faites une démonstration sur un cas réel. “Regardez, voilà comment j’ai utilisé l’IA pour préparer cette réunion.”
  • Accepter le refus : certains préféreront ne pas utiliser l’IA. L’important, c’est que ceux qui veulent tester puissent le faire sans pression.
  • Invitez les plus sceptiques à tester l’IA sur UNE tâche, pendant UNE semaine. Puis demandez-leur de partager ce qu’ils en pensent.

Astuce : Organiser régulièrement des espaces de dialogue autour de ce sujet. Par exemple une fois par mois. Accepter qu’il y aura toujours des disparités d’opinion.

Question 4 : Quelle gouvernance pour l'usage de l'IA dans mon équipe ?

Ça sonne corporate et rébarbatif, je sais. Mais en vrai, il est essentiel de se mettre d’accord sur les règles du jeu. Sans cadre, ça peut vite déraper. Quelqu’un télécharge des données confidentielles dans ChatGPT. Un autre crée 15 versions d’un doc avec l’IA et plus personne ne sait quelle est la bonne. Un troisième fait une présentation à un client et ne se rend qu’elle comporte des hallucinations de l’IA.

Les 3 règles minimales à poser dès le départ :

1. Quelles données pouvons-nous (ou pas) donner à l’IA
2. Qui valide le contenu généré : l’IA peut proposer, mais qui décide ? 
3. Comment gérons-nous les erreurs ou hallucinations de l’IA ?

Ce que vous pouvez faire cette semaine

Lancez la conversation en réunion d’équipe : “Si on utilise l’IA, quelles sont nos lignes rouges ?” Notez les réponses. Affichez-les quelque part. Ajustez au fur et à mesure.

Question 5 : Comment mesurer l'impact ?

Comment savoir si l’IA fonctionne chez nous ?  Voici quelques indicateurs intéressants :

  • Qualité du livrable : les livrables sont-ils meilleurs ? Plus aboutis ?
  • Niveau de créativité : votre équipe a-t-elle plus de place pour explorer, innover ?
  • Bien-être : les gens sont-ils moins stressés, moins en surcharge mentale ?
  • Apprentissage : l’équipe monte-t-elle en compétences sur des sujets stratégiques ?
  • Gain de temps : L’IA peut vous faire gagner 2 heures par semaine… que vous allez passer à faire 3 réunions en plus. Génial. La vraie question, c’est : qu’est-ce qu’on fait de ce temps libéré ?

Ce que vous pouvez faire cette semaine

Avant de démarrer quoi que ce soit avec l’IA, définissez 2 ou 3 critères de succès. Pas seulement “on a gagné X heures”, mais “on a pu faire Y, qui nous tenait à cœur et qu’on ne faisait plus”.

Ce qu'on retient

Ces cinq questions ne donnent pas une méthode, mais un point de départ pour réfléchir ensemble. L’intelligence artificielle ne s’impose pas du jour au lendemain dans une équipe. Elle s’invite, parfois discrètement, par un outil de prise de note, un moteur de recherche, un assistant d’écriture. Intégrer l’IA, c’est avant tout un sujet de culture et de gouvernance. Les technologies évolueront, les outils passeront, mais la question restera la même : comment faire en sorte qu’ils servent le travail ? La question n’est pas “jusqu’où l’IA va aller”, mais “quelle place on veut lui donner dans nos métiers, nos décisions et nos apprentissages ?“. C’est peut-être là le rôle du management aujourd’hui : créer les conditions pour que cette réflexion puisse exister dans les équipes.

Et si on en discutait ?

Vous voulez creuser le sujet avec votre équipe ? On propose des ateliers sur mesure pour vous aider à intégrer l’IA de manière humaine et pragmatique.

L'auteur

Romain Couturier

J’aide les équipes à mieux organiser leur travail pour gagner en fluidité et en efficacité au quotidien. Ce que j’aime le plus, c’est explorer les dynamiques de groupe et transmettre des outils qui rendent le travail plus clair et collaboratif. Si vous voulez en discuter ou découvrir mes partages, connectez-vous avec moi sur LinkedIn !

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