J’ai fait mes premiers pas dans la facilitation lors de missions de coaching et de formations agile en 2012. J’étais déjà attiré par les approches pédagogiques et cherchais à comprendre comment intégrer ces outils dans le contexte professionnel des entreprises et des administrations. J’avoue, j’appréciais aussi l’aspect ludique et aimais voir les participant(e)s s’amuser tout en apprenant.
Ce n’est que quelques années après que j’ai associé mes actions au terme “facilitation“. Si je ne me souviens pas précisément de l’instant de cette prise de conscience, je sais qu’une multitude de facettes et d’approches de l’intelligence collective se sont révélées à moi. J’ai découvert que ce que je pratiquais n’étais qu’une infime partie parmi toutes les facettes et les approches de l’intelligence collective.
Cet article s’adresse à ceux qui ressentent le besoin d’intégrer la facilitation à leurs compétences ou même d’en faire leur profession.
On me demande souvent comment débuter en facilitation. Voici donc les étapes que je recommande, j’espère qu’elles vous mettront sur la voie. Bonne lecture.
1. Trouver un lieu d’expérimentation et un premier groupe
Avant de chercher des ateliers et outils, trouvez d’abord un groupe de travail : des collègues, une association, votre équipe habituelle ou tout autre rassemblement de personnes disposées à partager un moment collectif. Par exemple, une réunion de préparation de l’amical de l’école, une réunion de suivi de projet facile ou l’assemblée générale de votre association.
Idéalement, ce groupe devrait compter entre 5 et 20 personnes (maximum, au-delà c’est compliqué de gérer un grand groupe au début) pour une session d’1 à 2 heures.
Proposez-leur de faciliter leur prochaine rencontre. Si vous avez bien choisi, ils accepteront. Félicitations, votre première mission est lancée !
Maintenant vous allez pouvoir commencer vos recherches.
Cette première étape de trouver un groupe est essentielle car elle vous donnera un vrai but à atteindre, de vraies contraintes que vous allez chercher à surmonter.
En ce qui me concerne, j’étais très impliqué dans une association lyonnaise professionnelle : le CARA Lyon. J’y ai trouvé une bienveillance et un espace de pratique fabuleux pendant plusieurs années. J’ai aussi enseigné à l’INSA Lyon. Les étudiants sont des groupes formidables pour expérimenter.
2. Chercher des outils/ateliers en fonction de la thématique du groupe
Une fois le rendez-vous pris, déterminez l’objectif de la session : à quelle question ce moment doit-il répondre ?
Puis recherchez des exercices comprenant :
- une activité d’ouverture
- des activités de travail centrées sur un livrable
- une activité de clôture
Cette structure est la base de tout atelier d’intelligence collective.
Parmi tous les sites anglophones, francophones et désormais ChatGPT, vous devriez facilement arriver à un première trame. Jetez un oeil à notre rubrique “ressources en intelligence collective” pour faire le plein d’idées.
N’hésitez pas à minuter les différentes parties de la séquence que vous avez imaginée.
Si vous voulez un exemple, lisez l’article sur «Un exemple de rétrospective à distance inspiré du World Café »
3. Simuler chaque atelier seul ou avec un binôme
En toute logique, vous devriez vous poser mille et une questions pour chaque atelier que vous avez mis dans votre agenda. La description des activités que vous avez trouvées doit vous permettre de :
- vous projeter dans l’espace
- penser au matériel nécessaire
- imaginer les étapes à suivre et leur enchaînement
Commencez à simuler chaque étape de chaque activité. Si une activité mentionne des rôles différents, créez des personnages que vous imprimez et répartissez-les dans la pièces pour vous rendre compte de la dynamique que cela va générer. Une bonne sécurité est donc de prendre le temps de l’expérimentation avant la situation réelle.
Quand je découvre une activité, je prends toujours mon papier et mon crayon et je dessine tout ce que je comprends pour m’imprégner de l’intention de l’activité.
4. Maîtriser son déroulé
Écrivez sur une fiche toutes les étapes, toutes vos notes de facilitation. Je ne compte plus les mémos, carnets, bristol et autres feuilles A4 volantes ou sketchnote que j’ai réalisés (et que je réalise encore).
Produire ces “anti-sèches” est un excellent moyen de s’approprier chaque étape de son déroulé et de commencer à anticiper des scénarios de réaction du groupe. Maîtriser son déroulé c’est aussi commencer à envisager quelques plans B au cas où tout ne se passe pas comme prévu.
Pour les ateliers qui ont une préparation spéciale, je relis tous les jours le déroulé et je me raconte l’histoire que je vais leur proposer. C’est une technique de mémorisation comme une autre 🙂
5. Faciliter l’atelier
Le jour J est arrivé, c’est le moment de vous lancer. Prenez la parole ou demandez à l’organisateur de vous passer la main dès l’introduction.
Prenez le temps pendant quelques minutes de poser le cadre. Cette étape cruciale rassurera votre auditoire quand ils verront et comprendront :
- pourquoi ils sont là
- qui est présent
- qu’est-ce que vous allez faire
- et comment vous allez vous y prendre
Vous pouvez préciser que vous démarrez dans la facilitation pour une éventuelle indulgence du public. Mais ne tombez pas dans le syndrome de l’imposteur, ne vous dévalorisez pas.
Une fois le cadre posé, exécutez votre agenda en gardant votre chronomètre à portée de main.
6. Débriefer à chaud avec le groupe
Après la déclusion, si quelques personnes sont encore là, vous pouvez prendre quelques minutes pour recueillir leurs retours sur votre facilitation.
Il s’agira ici de prendre de la hauteur, aussi appelée « meta ». Vous pouvez leur demander :
- comment ils ont vécu le temps collectif
- qu’est-ce qui était fluide et ce qui l’était moins
Laissez les parler dans un premier temps pour ne pas biaiser la sincérité de leurs retours. Si vous recevez des critiques qui vous heurtent, n’abandonnez pas tout de suite.
Tous les facilitateurs et facilitatrices ont vécu de grands moments de solitude, des ratages, des erreurs d’appréciation ou de lecture de groupe. La question qui devrait vous rassurer est : ai-je garanti la sécurité émotionnelle de toutes et tous à chaque instant ? Si la réponse est oui, alors toutes les autres critiques ne sont que du plus pour vous améliorer
7. Débriefer à chaud (ou à froid) individuellement
De nouveau seul(e), prenez une page et séparez-la en 2.
À gauche notez tout ce qui a déraillé, mal fonctionné pour vous (y compris et surtout ce que le groupe ne pouvait pas voir).
À droite, notez toutes les pépites, belles choses, fiertés que vous relevez de cette expérience.
Relisez votre feuille et constatez les idées qui vous viennent pour proposer une meilleure expérience la prochaine fois.
Il est désormais temps de trouver un autre lieu d’expérimentation !
Epilogue
Commencez également à rejoindre les réseaux de praticiens. Il en existe beaucoup. Un excellent point d’entrée est le FDay, une conférence en ligne annuelle autour de la facilitation à laquelle j’ai eu le plaisir de participer.
Conclusion
Vous avez fait un choix passionnant en vous orientant vers la facilitation. Ne regardez pas la longueur du chemin à parcourir (c’est la même chose pour toutes les disciplines) et laissez vous porter par votre envie de soutenir des groupes dans leurs réflexions collectives.
J’aurai à cœur de lire vos partages d’expériences pour celles et ceux qui auront appliqué ces recommandations. Vous pouvez me taguer sur vos réseaux sociaux (LinkedIn, Instagram). Si vous souhaitez aller plus loin dans votre pratique de la facilitation d’intelligence collective, je vous recommande l’une de nos formations. ⬇️