Dernière mise à jour de l’article : 27 février 2024
Pourquoi j'ai écrit cet article
Il est des articles qui montrent combien notre travail de pédagogie reste important. C’est ce que m’avait inspiré cet article du Monde Informatique Méthode Agile : 10 outils Kanban de gestion des workflows (lui-même étant une traduction). Il n’est ni faux ni vrai. Il m’a fait réagir. Disons qu’il simplifie, qu’il oublie des éléments et qu’il fait des raccourcis. Il laisse croire à la simplicité: “prenez un outil et hop, vous avez Kanban dans votre équipe”.
À l’heure où je relis et réactualise ce billet, je constate que rien n’a vraiment changé.
Cet article témoigne des efforts que nous, professionnel.les de l’accompagnement, devons encore fournir pour bien faire comprendre que Kanban est bien plus que des tickets qui se promènent sur un tableau.
Kanban c'est du collectif
La face visible de l’iceberg est donc ce tableau Kanban, composé de :
- colonnes plus ou moins nombreuses
- mais aussi de limites, de règles : à l’entrée, à la sortie et des règles de passages
- des demandes (les fameux tickets) qui elles-mêmes portent des informations
Un tableau Kanban c’est une masse importante d’éléments qui témoignent du fonctionnement du système. Si une personne seule s’occupe du Kanban, elle ratera probablement des informations et elle emportera rarement l’adhésion de l’équipe.
Kanban est un mode de gouvernance qui invite l’équipe entière à observer le pilotage de l’ensemble des activités. Un système Kanban est le reflet d’une situation à l’instant T et soumet des questions auxquelles l’équipe doit répondre pour définir la stratégie à venir. Quoi de mieux que de faire cet exercice collectivement ?
Prenons aussi en compte qu’un Kanban a forcément une entrée et une sortie. Il est donc connecté à d’autres flux de l’organisation. Le bon fonctionnement de votre Kanban sera donc dépendant du bon fonctionnement des autres systèmes auxquels vous êtes liés. Vous allez devoir échanger et vous synchroniser avec les différents services de l’organisation. Kanban, bien implémentée, devient ainsi une stratégie de décloisonnement et un encouragement à la collaboration au sein de toute l’organisation.
Kanban c'est plus que voir des tickets
La méthode Kanban se définit autour de 6 pratiques :
- Visualiser
- Limiter le travail en cours
- Entretenir le flux
- Rendre le processus explicite
- Mettre en place des boucles de feedback
- Améliorer par la collaboration et évoluer par l’expérimentation
Et comme l’Agilité, Kanban a ses propres principes :
- Démarrez là où vous êtes
- Poursuivez un changement incrémental et évolutif
- Respectez les processus, rôles, responsabilités et titres actuels
- Encouragez les actes de leadership à tous les niveaux dans votre organisation
Avouez qu’une simple gestion de tickets semble intuitivement un peu minimaliste pour implémenter une telle promesse 🙂 au mieux, les outils adressent une petite partie de la pratique n° 1.
Vous voyez que profiter pleinement de Kanban c’est aller au-delà des tickets 🙂
Kanban c'est piloter un flux de valeur(s)
Visualiser un système est déjà bien, et le structurer correctement en est une autre. Un Kanban est le reflet du processus du travail, c’est-à-dire de la succession des activités par lesquelles passe chaque demande. C’est ce qu’on appelle le flux.
Un tableau organisé en seulement 3 colonnes « à faire », « en cours », « terminé » ne répond donc pas à cette définition (cependant, si vous voulez mettre en place un Kanban personnel ce sera sans doute adapté).
À l’intérieur de ce flux circulent des demandes qui, pour qu’il garde tout son sens, portent une valeur. Dans quelle unité et comment est évaluée cette valeur ? Cela reste à la discrétion de chaque équipe.
Piloter un flux de valeur, c’est :
- faire le choix d’arbitrer à intervalles réguliers de nouvelles demandes entrantes
- privilégier celles qui délivreront le plus de… (à vous de compléter : euros, likes, gain de temps, audience, etc.) aux client.es du système
Kanban c'est exercer une pensée complexe
Un tableau Kanban a forcément une allure statique quand on le regarde. C’est pourquoi il faut le lire, croiser les données, l’analyser régulièrement : positions des demandes, limites, graphiques, règles en place, stratégie de l’entreprise, objectifs trimestriels, vision produit, etc.
Si vous êtes attentifs(ves) (et guidé(e)s au début), votre équipe découvrira comment elle doit agir pour le bien du système et de ses membres.
La puissance de Kanban surprend lorsque nous sommes face à des paradoxes étonnants :
- ralentir pour être plus performant
- refuser une demande à forte valeur pour préserver l’efficacité générale
- ne pas faire son travail, mais aller aider un.e autre membre de l’équipe
- etc.
Attention, ces effets d’annonce ne sont applicables que dans certaines circonstances bien particulières.
Il faut apprendre à lire la complexité d’un système Kanban pour en déduire les meilleures options d’action. C’est un changement radical de pilotage car les choix s’appuient sur une analyse collective macro ET micro du flux en prenant en compte toutes les données connues du fonctionnement de l’équipe à l’instant T.
La lecture des systèmes Kanban est un enjeu majeur pour bien appréhender cette méthode.
Kanban c'est vraiment pour tout le monde
Toutes les demandes doivent être produites avec des contraintes diverses (délai, qualité). Gérer un flot continu de demandes en parallèle avec ces contraintes est un contexte de travail partagé par tous les métiers : assistance administrative ou téléphonique, marketing, commerce, ressources humaines, DSI, R&D, exploitation, maintenance, etc.
À partir du moment où vous gérez du temps et des priorités, vous allez mettre en place des mécanismes de pilotage plus ou moins efficaces. Kanban n’est pas attaché à un métier ou à un domaine, quelle que soit votre fonction dans l’organisation, vous êtes déjà dans un flux de travail.
Autre particularité de cette méthode, aucun rôle n’est prescrit. Ce qui peut apparaître comme une faiblesse permet au contraire à Kanban de s’adapter à n’importe quel système.
Je démarre souvent mes missions avec des organisations qui sont sous l’eau (trop de projets, trop de tâches). Elles sont toujours en retard, courent, dépensent beaucoup d’énergie pour faire mieux, mais voient pourtant peu d’effet. C’est malheureusement un constat que beaucoup d’entre elles font.
Kanban n’est pas la promesse de résoudre tous les problèmes. Elle offre un regard neuf sur notre façon de travailler en prenant en compte beaucoup plus de paramètres que n’importe quelle autre méthode. C’est ce qui en est fait toute sa puissance, elle interroge nos habitudes, nos structures et nos cultures professionnelles pour trouver de nouveaux leviers.
Démarrer son Kanban
Je vous invite à suivre les étapes de construction de votre premier système Kanban ou tout simplement à confronter ce que vous faites aux premiers bons principes que je vous partage dans ces 2 vidéos.
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